Le Wazzou polygame de Oumarou Ganda

Films / Niger

Le Wazzou polygame de Oumarou Ganda

Oumarou Ganda (Niger), Argos Films (France) Une critique acerbe et sans concession de la polygamie.

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Etalon de Yennenga au Fespaco et Prix de la critique internationale au Festival de Dinard en 1972, Le Wazzou polygame de Oumarou Ganda met à mal la polygamie, et à travers elle le mariage forcé.

Le personnage principal est notable de village. Il se nomme El Hadj, nom attribué à ceux ayant réalisé le pèlerinage à la Mecque. Ce dernier désire convoler en troisième noce avec une jeune fille nommée Satou, au grand damne de sa deuxième épouse et de la première concernée. Car Satou est amoureuse de Garba, jeune homme auquel elle était promise à l’origine. Mais El Hadj fait fi de l’avis des autres. Il est préteur pour une grande partie du village et s’autorise de ce fait tous les caprices.

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Les conséquences néfastes de ce mariage forcé ne se font pas attendre. La seconde épouse tue par erreur une innocente et déclenche la fuite de Satou. Fuyant le village, cette dernière, happée par les vices de la grande ville, finit par faire « boutique de son cul ».

Le Wazzou polygame de Oumarou Ganda rend compte des conséquences désastreuses des abus de pouvoir que certains s’abrogent dans la société nigérienne traditionnelle. Cette critique s’étend également à l’ensemble de la société africaine. Sans concession, le film dépeint une tartuferie religieuse.

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Les personnages quasi satiriques pourraient parfois prêter à rire s’ils n’avaient pas cet accent de tragique vérité. Le récit présentant de nombreuses ellipses mène le spectateur vers une morale inéluctable : « Aller à la Mecque ne change pas le cœur d’un homme ».

A travers de belles images et des personnages hauts en couleurs – celles des pagnes qu’El Hadj vend et que de villageoises au caractères bien trempés portent - on sent une sincère affection pour la terre nigérienne et ses traditions.

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Oumarou Ganda, au panthéon des réalisateurs africains de renom

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Oumarou naît à Niamey au Niger en 1935. A 16 ans, il est appelé en Indochine à combattre comme tirailleur dans le corps expéditionnaire français.

De retour au pays, son chemin croise celui de Jean Rouch. Ce dernier l‘engage pour enquêter sur les immigrés nigériens en Côte d’Ivoire. Leur route commune se poursuit au cinéma. Oumarou jouera le rôle principal du film du fameux ethnologue : Moi, un noir.

Le Nigérien se forme ensuite à la prise de son et d’image et à la réalisation au sein du Club culture et cinéma du Centre Culturel Franco-nigérien. En 1968, il réalise Cabascabo inspiré de son expérience de tirailleur africain dans les rangs de l’armée française.

Le Wazzou polygame est son second film qui connaît une belle reconnaissance de ses pairs. Sa carrière se caractérise par la suite par la réalisation de documentaires et d’un autre film de fiction et de critique sociale, Saitane, dans la lignée de Le Wazzou polygame.

Un hommage immense à la hauteur de son apport au cinéma africain lui a été accordé récemment : Un prix au Fespaco porte désormais son nom.

Eva Dréano

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