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MAMA SISSOKO nous fait (re)découvrir les musiques du Mali

Sans Commentaire / Pschent

SOUL MAMA, disque du mois de mai 2020 chez Fip

Après une carrière déjà féconde et riche, ce pilier de la musique malienne sort encore un nouvel album.

A l'occasion de son album "Soul Mama" - qui sort chez le label "Sans Commentaire" ce 15 mai 2020 -,  Mama Sissoko a accepté de revenir pour nous sur son parcours. Grande figure de la scène musicale malienne, Mama Sissoko vient d'une "brousse", pour reprendre ses mots - plus précisément de Djoumara, sis à une centaine de kilomètres de Bamako.

Entouré d'un père griot et de deux frères trompettistes, il dit être "né dans la musique". Auprès de son paternel, il apprend déjà à jouer au ngoni, et profite de la présence à ses côtés d'un instrumentiste avisé. Adolescent, il doit devenir mécanicien aurpès de son oncle Djeli Baba Sissoko ; mais il s'agit là d'un joueur de ngoni très doué et populaire à Bamako, et, faute de mécanique, Mama Sissoko va rapidement progresser en musique ! Aujourd'hui, le musicien déclare beaucoup devoir à cet oncle pédagogue qu'il qualifie de "maître". 


Ensuite, tout s'enchaîne avec célérité. Le président Modibo Keita, alors au pouvoir, le repère lors d'une fête traditionnelle et l'intègre rapidement à l'Ensemble Instrumental National. Par la suite, Sissoko devient guitariste soliste au Badema National.

Autrement, on le connaît évidemment aussi comme compagnon de route du grand Ali Farka Touré. A ses côtés, et avec également Bassekou Kouyaté, il a fait une tournée de dix ans et co-réalisé, en 2006, l'album "Savane". Ce mois-ci, il lui rend hommage par le biais d'un single, qui sort, lui, le 1er mai 2020. Dans le sillage de Touré, Mama Sissoko marie de même le blues avec les musiques traditionnelles du Mali.

Otis Redding et Jimi Hendrix comptent ainsi parmi ses idoles indéboulonnables ; mais, en même temps, le musicien compte bien rendre hommage à la grande diversité et richesse des différentes musiques du Mali. On peut s'en convaincre à la faveur de cette mini-série "Afrique, aux sources de la soul", où on voit le guitariste et joueur de ngoni puiser à différents confluents, les diverses régions du pays - Kaye, Ségou, Sikasso... - : 

 


La liste des artistes célèbres avec lesquels il a collaboré peut sinon donner le vertige, puisqu'y figurent Salif Keita, Baco Dagon, Kassé Mady, Oumou Sangaré, Afel Bocoum, Lobi Traoré, et Vieux Farka Touré, entre beaucoup d'autres. A présent, il n'hésite pas à conseiller la jeune génération qu'il ne cesse d'inspirer, dont son neveu Kandiafa - avec lequel nous avions déjà pu nous entretenir. Ce n'est d'ailleurs personne d'autre que Kandiafa lui-même qui lui souffle l'idée de sortir cet album, qui, malgré les soixante-dix printemps de son auteur, s'avère très entraînant et rafraîchissant.

Alors qu'on arrive à le joindre sur WhatsApp, Mama Sissoko nous apparaît comme un homme serein, comblé, heureux. Il prononce le mot, d'ailleurs, nous confiant que la musique lui fait un bien fou, et avouant : "Quand je suis énervé, que j'ai des problèmes, que je ne sais pas comment faire, pendant quinze minutes je trouve la solution en jouant de la guitare ou du ngoni."

Il rit, et répond à nos questions avec beaucoup de courtoisie et d'alacrité ; et nous chante une chanson à brûle-pourpoint. L'espace d'un instant, on oublie complètement le coronavirus. Le quoi ? Chut, le maître chante.

ZOOM

La genèse de l'album "Soul Mama"

Quand on lui demande comment cet album est né, Mama Sissoko nous répond :

"Cet album, c’est formidable. Je n’y étais pas disposé, parce que je n’avais pas de musiciens à ma disposition. Ensuite, avec les musiciens que j’ai trouvés, on n’a pas répété. Ce sont en quelque sorte des improvisations."

Matthias Turcaud