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Bassekou Kouyaté, le ngoni fort et la famille haute

Bassekou Kouyaté a réinventé la pratique de ce petit luth traditionnel, attribut de prédilection du musicien malien, le ngoni.

Après trois albums connaissant un franc succès, de nombreuses tournées à travers le monde, Bassekou Kouyaté accompagné de Ngoni Ba revient avec un album au son furieusement rock : Ba Power.

Ba en bambara signifie fort et groupe. Fort comme les messages portés par ses morceaux. Et le groupe ? Il est représenté par sa famille qui l’entoure et crée avec lui.

Interview avec Bassekou ou la force tranquille.

Africavivre : De quoi est fait votre nouvel album ?

Bassekou : Ce nouvel album est afro-rock. Nous y avons infusé des rythmes bamana (Ndlr : par le terme Bamana, les Bamakois font référence aux Bambara ou Bamanan de la région du Beledugu. Cette région commence immédiatement au nord de Bamako).

Ce qu’on aime c’est prendre des rythmes traditionnels pour les faire devenir rock.

Africavivre : De quoi parle ce nouvel album ?

Bassekou : Dans cet album, je parle de la guerre en Afrique. Les gens viennent tuer chez nous. Ces musulmans, ce sont des terroristes. On doit être vigilant avec eux. On parle également de la jalousie en Afrique.

On parle aussi des femmes, du droit des femmes. Ce sont les femmes qui fondent le monde. Ce sont elles qui régentent la vie d’une famille en Afrique. Et pourtant, malgré tout ce qu’elles apportent à l’Afrique, elles ont très peu de droit.

Aminata Sacko Bassekou Kouyate

La chanteuse et épouse de Bassekou Kouyaté, Aminata Sacko, interpréte le morceau Siran Fen accompagnée du groupe.


Africavivre : Où a-t-il été enregistré ?

Bassekou : L’album a été enregistré à Bamako dans le studio de mon fils, Mamadou Kouyaté. Des ingénieurs du son sont aussi venus de l’étranger pour compléter l’équipe sur place. On a travaillé pendant 6 jours pour l’enregistrement. C’est le premier live qu’on a fait dans ce studio.

L’album a été enregistré avec ma femme, Aminata Sacko, mon fils, mes petits frères, mon neveu… En dehors du groupe j’ai invité des gens tels que Adama Yalomba, c’est un artiste qui a chanté sur le morceau Wati, qui signifie Le temps. Egalement, Zoumana Tereta, un grand chanteur malien, fait partie de cet album. Je les ai invités car je sais qu’ils ont du talent. Et ils n’ont pas toujours l’opportunité de sortir du Mali.

J’ai invité aussi un de mes frères du Nord, Samba Touré, qui joue de la guitare, pour illustrer la solidarité entre le Nord et le Sud. Pour moi, les musiciens doivent avant tout montrer la bonne route, le chemin de la paix.

Africavivre : Oscillant entre rock, blues et tradition bamana, vous réinventez la manière de jouer du ngoni. Vous aimez modifier les sons traditionnels. Dans Ba Power, avec quels instruments jouez-vous ? Que réinventez-vous ?

Bassekou : Le ngoni est toujours mon instrument favori mais j’ai voulu introduire cette fois-ci une trompette, de la batterie et une guitare dans la formation pour instaurer du changement.

Africavivre : Que dit votre musique sur le Mali actuel ?

Bassekou : Les Ngonis existent depuis bien avant la naissance de Jésus Christ. Cette musique n’avait jamais été exploitée sur le plan international aussi je voulais montrer une image du Mali, belle et positive. Et, dire qu’il n’y a rien de plus beau que la musique. Je voulais être un messager de la paix et de la joie.

Africavivre : Vous jouez avec vos fils, vos frères et votre femme. La musique est-elle toujours une affaire de famille ?

Bassekou : Chez les Kouyaté, l’art de jouer du ngoni se transmet de génération en génération. Nous venons d’une lignée de musiciens. Nos parents ont toujours fait de la musique. Dans ma famille, nous sommes des griots. C’est comme cela, la musique est en nous.


Bassekou Kouyaté & Ngoni Ba - Siran Fen


ZOOM

Le portrait chinois de Bassekou Kouyaté

Africavivre : Si vous étiez un(e) auteur(e) africain(e). Qui seriez-vous ?

Bassekou : Amadou Hampâté Bâ

Africavivre : Si vous étiez un(e) réalisateur/trice africain(e). Qui seriez-vous ?

Bassekou : Mamo Cissé car son film Yelema m’a beaucoup touché.

Africavivre : Si vous étiez un(e) musicien(ne) / chanteur/teuse africain(e). Qui seriez-vous ?

Bassekou : Ali Farka Touré, Fela Kuti, ou ma femme Aminata Sacko.

Africavivre : Si vous étiez un plat africain. Lequel seriez-vous ?

Bassekou : Le tô qui est une pâte de manioc.

Propos recueillis par Eva Dréano